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août 09, 2012

Le livre de l'intranquillité

Je suppose que la plupart des gens, croisés au hasard des rues, emportent eux aussi - je le remarque au mouvement muet des lèvres, à l'indécision vague des yeux, ou aux prières qu'ils élèvent bien haut, avec un bel ensemble - un même élan vers cette guerre inutile d'une armée sans bannières. Et eux tous - je me retourne pour contempler leur dos de pauvres gens, leur dos de vaincus -, tous doivent connaître, comme moi, la grande, la sordide défaite, perdue dans la boue et les roseaux, mais sans la poésie des étangs, sans clair de lune pour en baigner les rives - une défaite minable et boutiquière. Ils ont tous, comme moi, une âme exaltée et triste.

Fernando Pessoa

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