Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

"Ecriture d'invention", Guérande, 2009-2010, Culturel

SESSION 8 / ECRIRE LES LIEUX

SESSION 8 / ECRIRE LES LIEUX

A partir d'incitations à écrire "avec" les lieux

ILE DE SEIN
Cinquante milliards de grains de sable
Trois bars
Un hôtel bleu et jaune
Un seul autre sur le port
Pas un arbre
Quinze bateaux de pèche
Un verre à boire puis deux puis trois
Une seule boutique
Dix mille cailloux, vingt mille rochers, trente mille pierres, du minéral, du minéral,
Trois chiens,
Une voiture,
Quinze mille rires d’enfants qui jouent librement
Une forêt de mâts,
Huit cent cinquante deux rayons de soleil
Quinze millions neuf cent quatre vingt un mille deux cent soixante trois gouttes de pluie
Deux bateaux par jour
Soixante tempêtes par an
Dix mille rafales qui vous fouettent
Huit cents marées
Des kilomètres du continent
Vingt chemins qui se croisent
Cent cinquante trois mille pas pour tout voir, tout parcourir,
Un milliard de grains de sel.
Nicole T, février 2010

AR MEN
Un jour
Le grain de sable irritait ses yeux,
Un jour
Le sel lui brûlait la peau,
Un jour
Les rafales lui glaçaient les os
Un jour
Le bateau ne la conduisait plus sur le continent
Un jour
Même le chien s’ennuyait
Un jour
Les rochers devenaient trop durs pour s’asseoir
Un jour
Elle a saisi sa truelle
Un jour
Elle a choisi le bleu de la mer et le jaune du soleil
Un jour
Elle a ouvert sa maison
Un jour
L’hôtel a accueilli les uns
Un jour
Il a reçu les autres
Un jour
Ils s’y sont retrouvés.
Nicole T, février 2010


Un soir
La petite fille s'est cachée entre les quatre pieds de la table de la salle à manger sentant toujours bon la cire.
Un soir
Elle est hypnotisée par les miettes de pain oubliées par l'aspirateur entre les brins de haute laine du tapis.
Un soir
Elle préfère regarder danser les grains de poussière au travers du rai de lumière tombant de la fenêtre.
Un soir
Si seulement il n'y avait pas, juste en dessous du vase en cristal de Bohême, tous ces pétales de roses fanées qui lui font penser que toutes les choses ont une fin.
Un soir
Elle choisit d'ignorer les vieux journaux abandonnés sur le velours usé du fauteuil.
Un soir
Elle se demande ce que tentent de lui raconter les piaillements des oiseaux venus se coucher dans les arbres du jardin.
Un soir
Plus aucun bruit familier ne lui parvient de la cuisine.
Ce soir là
Le chien n'est pas rentré et toi, maman qui ne nous a pas appelées pour le goûter.
Ce soir là
Sa vie d'enfant n'avait plus le même goût.

Christine. V, février 2010


Irikan Fola

Il y a
derrière les lumières de Doumouna
au fond du tombeau des forêts
l’écho du solo d'un vieillard
courant, sifflant
du dessous des racines du temps
jusqu’à la cime cassée des oreilles du vide.

Un chant désarmé
jouant avec les questions
en nouant les repousses
aux cheveux déjà perlés des esprits
transformant en un souffle alchimique leur ADN
pour rendre à cet épiderme abimé
la force de la plus belle et plus intime prière.

Soudainement
parce qu’emporté en une transe spiralesque
il oublie la suite de ses mots
le vieillard fut projeté dans une cage carnassière
ciselée du blindage d'omégas auréolés
au stock des bidonvilles du monde
surmontés de visions anarchiques de guerres omnivores.

-« Joëlle !» appela-t-il
son amie des neiges éternelles
mais fut pris de craquements
comme un croquemort
aux empreintes pourpres
bridées d’ambre
se laisse croire qu’il mange les ombres
pour qu’elles retrouvent la lumière
au creux de son ventre.

II allait mourir
tout lui filait des doigts
et pour le rassurer une voix lui dit :
-« T’en fais pas
ce sera comme disparaissent devant la pointe du critérium
ces hallucinations
où médusa referme un coquillage
sur le clair d’une lune ronde
rappelant à l’uranium
de lui baiser l’allégeance d’une main
et en un adieu des frères Touti et Néni
te soulever jusqu’à toi »

Mikae


Abdallaye

Un matin l’on m’accueille sur Abdallaye.
Le midi, l’on me donne à manger.
Ca c’est cadeau.
Cet après midi il me dit viens voir.
À la seconde il me dit l’histoire.
« Soundjata, Koumba, la fête du diable »
À la seconde je deviens tout noir.
À la seconde je sais qu’il m’oublie.
Je sais mon autre nom.
C’est la tombée de la nuit !
Moi, mes grigris, écoutons les bruits !
Là, c'est la nuit !
Moi, mes grigris, écoutons les bruits !
Il est 7 heures du matin, je n’ai pas dormi.
Alors ce matin, j’ai les yeux c est des crevasses.
Deux nids de poules.
Même pas en face de la fourchette de l’axe entre les routes.
Y’en a un qui dit à ce soir.
L’autre encore dans son plumard à lorgner mes croûtes.
Raaaaaaaaah ! Moustikos !
Je n’en peux plus.
Alors ce soir je m endors à l’ombre d’un arbre.
Je n’en connais pas le nom.
Ce soir, je dors, je dors pour de bon.
Au beau milieu de la cours.
Comme ça, sous cet arbre.
J’m’en fous, oh oui j’m’en fous.
Papa, si tu savais comme je me fous de tout.
Il pourrait même être l’ultime moment de l’apokk.
Il est 29 heures je crois lorsque quelqu'un me réveille.
Qui ? J’en sais rien !
II se présente, c'est Madhou.
Qui ? J’en sais rien moi, c’est juste Madhou.
Il me raconte que cette nuit est une nuit blanche qui se profile
dans l’ombre des cafés de nuit.
C’est pas possible encore...
Je me rendors au cours du fil et me réveille après minuit
à danser comme dans les rêves.
Des semaines de rêves,
des semaines de rire,
des semaines à boire la sève d’un soleil qui ne cesse de luire.
Des journées à tendre l’oreille,
à donner l’œil aux spacieuses ententes,
à troquer les masques de l’occident contre de la cendre et des plantes,
et à gratter, spasmophile, les plaies que les bestioles m’ont laissé.
Sans doute des heures sur le trône à me demander quels ingrédients...
Des heures à tanner mes mains sur la peau de chèvre du djembe.
D’instants en instants,
se chevauchant sans demander leurs restes,
j’apprends.
Je réapprends à vivre...
Mikae


Un bon milliard de Bamako

Un bon milliard de Bamako, du fictif, abstrait, imaginaire
Là bas tournant dans la magie des Koris
Et le lait de coco
Et les deux cent milles pattes qu’il me faudrait pour y aller de mes deux...
3 ou 4 je ne connais pas
1 seul tout a zéro
Zéro programme, zéro
Ah si!
Une dizaine de « ah oui ! »
Une quantité de « oh non! »
Milles yeux noirs recherchant
1 enfant aux milles dollars
À en compter les peut être
Un milliard de Bamako
Sont les notes d'Amara
Centaine de rythmes afros
En mémoire sur bout des doigts !
1, je dois tout reprendre à zéro
Nul, je suis nul, nul
Nul je suis
71 shirts 4 futaies
1 paire de pompes
J’aime pas les sandales
Oh, et puis merde, des babouches
1 seul nord puisqu'Obama
La baraka, une Baraka
1 univers, tous unis vers 1 connu
Combien sont ils les inconnus ?
Les Trois frères de 1 absolu
J’irai tout seul à Bamako
les peurs et le courage
Et mon cœur dans le bagage
Les gouttes de pluie là bas
Compte les, compte les pas
Les pas d ici à là 1, 2, 3
Poly ou monothéiste?
Une prière après séisme, trop tard
Allah ka doulougou mandié...
La même lune ?
Je ne pense pas
Et les dunes du Sahara
Plus au nord
Combien comptent-elles de morts ?
Verbalgébre et trop de chameaux
De patchwork de bazin, de machmalos grillés dans le feu des grillots
J’irais peu être pas a Bamako
En fait j’en sais rien, hé....!

Mikae