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... écrire un temps puis un autre, s'arrêter chaque fois dans le mouvement des choses…
un "samedi pour ecrire"
LE 07 février 2009
Thème : Ecrire les autofictions de soi
Parler de soi encore et encore ! Mais soi est un autre, des autres ! La proposition de visiter ses identités multiples et d'écrire des fragments autobiographiques
LIEU, Guérande intramuros, place St Jean
HORAIRES, 10h00-12h30 et 14h00-16h30 (durée : 5h00)
Quelques productions
"Je ne suis pas..." (à la manière de Barbara)
Je ne suis pas une bougie rigolote
Je ne suis pas un lion souple
Je ne suis pas un caramel curieux
Je ne suis pas une bouteille lumineuse
Je ne suis pas un ballon frais
Je ne suis pas un brin vivant
Je ne suis pas une ruelle harmonieuse
Je ne suis pas Diolem Prinquet
Je suis une femme qui bouge.
Dominique. L
Détails fictifs de la vie de personnes fictives ; "La criminelle en moi" ; ses petites
manies
Tout doit être propre, impeccable dans la maison
Chaque objet a sa place
Voiture toujours garée nez au nord
Avoir toujours un chapeau, un bonnet hiver comme été
Entretenir un fouillis de fleurs dans le jardin
Ne manger que des yaourts danone
Jamais de poireaux dans la soupe
Brigitte. H
"un faux texte"
J’ai été une enfant de couleur dans l’Afrique du Sud de l’apartheid, j’ai subi un lifting des paupières à 58 ans, j’ai recommencé mes études en sciences de l’éducation en Norvège, j’ai pris des produits stupéfiants illicites devant une cohorte de CRS, j’ai été violemment agressée par des chiens de traîneau alors d’un voyage en Alaska, j’ai retourné ma veste en accusant un ami d’avoir volé à ma place, je n’ai pas goûté au super dessert en chocolat que l’on m’a proposé pour mon anniversaire, j’ai toujours cru que la réussite tenait de la volonté, j’ai été membre d’une association qui réclame que les étrangers soient refoulés hors de France, j’ai été actrice dans une pièce de comédie au Café de Paris, j’ai sollicité des touristes pour qu’ils caressent mes serpents sur la place Djamel Ephna, j’ai décidé de ne pas payer mes impôts, j’ai appris la langue Tchétchène par cassette audio, j’ai secouru un alpiniste qui avait dévissé alors que je faisais l’ascension du Mont Blanc, j’ai été envoyé en mission comme espion par les renseignements généraux pour démanteler un trafic de stup au port de La Turballe, j’ai participé à un colloque sur la nécessité de créer une loi anti-fessée dans les milieux défavorisés, j’ai mangé da la viande le jour du vendredi Saint lors de ma visite à Rome, j’ai toujours été décalée sur l’art en général, j’ai souvent été traitée de mégalo et de schizo dangereuse et malsain, j’ai été emprisonnée au Maroc par erreur, j’ai grandi dans de la soie et du coton, j’ai demandé tous les ans à mon anniversaire depuis l’âge de 18 ans une Ferrari rouge décapotable, j’ai eu la chance de recevoir un prix pour remerciement de loyaux services à la nation, j’ai adulé un Dieu et ses Saints en me soumettant à des rituels intransigeants, j’ai cru à l’individualisme comme seule solution pour sortir de la crise.
Jacotte. V
"A travers les âges entremêlés" ; "Sourires et photos"
A 3 ans et demi, elle avait l’air sérieux de sa mère, directrice d’école. Sur cette photo, on sait qu’elle a fixé le photographe sans ciller et, s’il s’est évertué à la faire sourire, nul oiseau prêt à sortir de sa boîte n’est parvenu à la dérider. A 13 ans et demi, on retrouve la même enfant, mais elle s’est résignée à sourire quand il le faut… sans petit oiseau. Ce qu’elle observe elle le garde, ce qu’elle ressent, elle le cache. Education rigide qui lui a enseigné à se méfier de sa spontanéité. A deux secondes près, elle aurait manqué la rencontre de sa vie : étant parmi les premières de la liste des lauréats, elle avait vite repéré son nom et avait voulu sortir… mais la foule des lycéens qui se pressaient dans le hall l’avaient retardée.
A 52 ans tout cela lui revient en mémoire alors qu’elle vide les armoires de ses parents et trie de vieilles photos : à 111 ans il avait encore fière allure son perroquet rapporté d’Indochine par son grand- père au retour d’une guerre dont il ne racontait rien, que la douceur des indigènes. Lorsque ce perroquet était mort, elle avait 32 ans, elle avait eu l’impression de perdre une seconde fois ce grand- père qu’elle adorait et savait si bien la faire sourire.
Dominique. L
"Détails fictifs de la vie de personnes fictives"; les petites manies de la chocolatière en moi
Faire des listes
Recompter ce qu’elle a déjà compté
Collectionner les pubs alimentaires
Boire un verre d’eau le matin
Décoller les étiquettes de prix
Lisser les papiers alu avec le dos d’une petite cuillère
Emietter son pain
Faire des découpages montages collages de photos
Goûter à tout.
dominique. L
"Je ne suis pas..."
Je ne suis pas un tournesol polluant
Je ne suis pas un accordéon compatissant
Je ne suis pas une casserole savoureuse
Je ne suis pas un tournevis nauséabond
Je ne suis pas un putois pratique
Je ne suis pas de la dioxine merveilleuse
Je ne suis pas un individu musical
Je ne suis pas Votca Ratije
Je suis une femme qui partage
Jacotte. V
"A travers les âges entremêlés"
A 3 ans et demi, elle tomba du haut du pallier ; elle y avait grimpé malgré les interdictions incessantes du père. La mère l’avait retrouvé en bas, inanimée, le visage blême. Secouée et brinquebalée, elle avait rouvert les yeux au milieu des cris. A 13 ans et demi, elle avait rencontré son premier amour, il arrivait d’Italie pour travailler sur le chantier de la mairie, il avait 88 ans. Très vite, elle avait été secouée par un violent bouleversement en elle, elle l’adulait et rêvait de lui à chaque instant, elle n’en avait encore parlé à personne. A 2 secondes, son premier cri sortit de sa bouche. Elle en fut elle-même surprise, elle qui n’avait entendu que les bruits assourdis de cris d’enfants ; ses frères et sœurs sans doute et du rire de la mère. Elle sentait que ce cri qui lui déchirait la gorge ne s’arrêterait jamais, il n’était que souffrance. A 52 ans elle se sentait si seule et même temps libérée ; elle avait fait aussi bien qu’elle avait pu en élevant ses deux filles qui s’étaient échappées du nid à présent ; et souvent elles repensaient à ces moments de partage et de rire qui avaient remplis son quotidien pendant toutes ces années. A 111 ans elle sentait que son âme prenait de plus en plus de place. Son corps se rabougrissait de jours en jours et seules ses pensées lui semblaient encore claires et lucides. Elle ne parlait plus mais observait, elle ne savait plus trop qui était qui de sa petite fille ou de ses arrières petits enfants. Elle avait donné naissance à une grande lignée de filles robustes et drôles. Elle en était fière et résistait contre la mort pour eux, elle voulait encore voir et revoir ces visages aimés, ressentir leurs mains posées sur les siennes dans un partage d’amour sans limites. A 35 ans elle avait déménagé pour suivre son mari, elle en avait beaucoup souffert, s’éloigner de sa famille, de sa mère surtout lui avait semblé être insurmontable, elle avait beaucoup pleuré. Mais elle avait cette force indestructible qu’elle sentait tenir de cette souche maternelle et elle voulait lui faire honneur. Alors, petit à petit, elle avait rebâti près de ses deux filles, un nouveau monde d’amour et de joie.
Jacotte. V
"un faux texte"
J’ai été la première femme avocate ce qui m’a permis de défendre Brutus, bien sûr j’ai perdu, car tout le Sénat l’avait vu assassiner César, tous en ont profité pour déclarer qu’une femme n’était pas capable de défendre un assassin, et depuis durant des siècles, seuls les hommes ont pu faire ce métier, pas découragée j’ai décidé d’être la première femme à étudier les étoiles, encore une fois personne ne m’a cru quand j’ai déclaré que la terre tournait autour du soleil, mon fils Galilée étant un homme a pensé qu'il arriverait à en persuader le monde, hélas il n’était pas ami avec le pape. C’est alors qu’avec un copain d’école, Christophe, j’ai décidé de partir en mer pour découvrir les Indes, au retour les Indes sont devenues l’Amérique, Christophe est devenu Colomb, et moi j’ai dû élever les enfants que nous avions eu pendant le voyage aller et retour ; Ma fille ainée Jeanne s’est mariée avec un Monsieur d’Arc, un lorrain, au lieu de rester à filer la laine, elle est partie sur les routes et a fini brûlée à Rouen, quelques années plus tard c’était une sainte, nous avons bien ri dans la famille en repensant à son mauvais caractère, et quelle peste elle avait été. J’ai alors décidé d’y aller en Amérique, c’était plein d’indiens, plein de bisons, là-bas on m’appelait Calamity Jane, j’ai bien joué avec ma Winchester, j’ai souvent discuté dans les bars avec Lucky Luke, et ai même volé son cheval Jolly Jumper ; attaquée en justice pour ce vol j’ai été défendue par Maitre Collard, et ai écopé de 20 ans de bagne, heureusement depuis quelques temps je fréquentais Houdini et n’ai eu aucun mal à m ‘échapper. Depuis j’ai été la première femme astronaute, je devais marcher sur la lune, mais avant le départ Neil Armstrong m’a bousculée méchamment j’ai eu un arrêt de travail et c’est lui qui a marché sur la lune, je suis repartie plus tard avec Tintin, et cette fois là j’ai bien profité de la promenade
Brigitte. H
"A travers les âges entremêlés"
Elle a 3 ans et demi et elle ne comprend pas, ne comprend pas quoi ?
Elle ne sait pas, d’ailleurs elle ne sait pas écrire, il lui est donc difficile de s’exprimer, car elle est muette, pourquoi est-elle muette ? Que lui est-il arrivé ? Il y a eu ce temps où elle parlait, puis plus rien…A 13 ans et demi, dix ans plus tard donc, elle ne parle toujours pas, disons plutôt qu’elle parle mais rarement, et pour tous c’est un émerveillement, en effet elle ne parle pas pour ne rien dire, tous ses mots sont recherchés, travaillés, sortis de lointaines pages de dictionnaires, et chacun y trouve sa propre vérité, assenée par elle, jeune fille de 13 ans et demi. A 52 ans, elle parle, elle parle, elle parle, elle a appris des mots creux, mais puissants, elle sait faire de longues phrases, qui attirent les foules, elle réussit à faire croire en elle, elle a des projets, des idées, et tout cela vole au sortir de sa bouche sans arriver à rien, elle est députée. A 111 ans elle est morte, mais sa statue est partout, toutes les villes du pays ont une rue à son nom, tous se souviennent de ses paroles, de ses phrases, et tous croient que tout était si bien avant quand elle parlait, tous sauf quelques uns qui se souviennent qu’à part parler elle n’a rien fait, rien réalisé, d’autres ont ramassé ses mots et en ont fait ce qu’est la vie de maintenant . Une vie qu’à 35 ans elle n’aurait jamais acceptée, une vie qu’à 35 ans elle aurait rejetée, elle serait entrée en résistance contre ceux qui auraient voulu l’y mener. A 35 ans elle parlait encore avec de vrais mots, des paroles simples qu’il n’était pas possible d’interpréter, tout avait un sens, tout était réalisable, mais elle n’a pas été écoutée, elle n’a pas su faire, alors pour ne plus être seule elle a commencé à employer des mots creux mais puissants.
Brigitte. H